Avant même le sommet moteur organisé à Bahreïn, les doutes autour des règlements techniques de 2026 étaient déjà dans toutes les bouches. La rumeur d'un retour des V10, évoquée en coulisses, avait ravivé les débats. Mais les pilotes, interrogés dès le jeudi, semblaient deviner l'issue : un retour en arrière semblait hautement improbable.
Carlos Sainz s'était montré particulièrement sceptique sur la direction prise.
"Je ne serais pas en train de défendre le retour du V10 si j'aimais ce que je vois pour 2026. Mais comme je n'aime pas vraiment ce que j'en vois — que ce soit pour la voiture, le moteur ou la manière dont tout va fonctionner — je dirais oui : je veux un V10, et plutôt maintenant que plus tard."
Il appelait néanmoins à la prudence : un revirement brutal risquerait de décrédibiliser l'ensemble du processus.
"En même temps, ce ne serait pas juste de ne pas laisser une chance à ce règlement, s'il est si bon comme on le prétend. Mais tout le monde semble croire qu'il ne l'est plus — c'est pour ça qu'on en reparle. C'est un peu étrange, non ? On verra. Ce n'est pas moi qui décide. C'est politique. Les grands patrons décideront."
Quelques heures plus tard, ces "grands patrons" — Mercedes, Audi et Honda en tête — opposaient effectivement une fin de non-recevoir à toute dérogation anticipée. Le règlement 2026 est confirmé tel quel : moteur V6 turbo, carburant synthétique, et une puissance électrique portée à 350 kW.
Oscar Piastri, lui, avait déjà adopté un ton plus posé, confiant dans le rôle des pilotes pour accompagner la transition, tout en reconnaissant la complexité des ajustements à venir.
"Je pense que nous, pilotes, avons un rôle important à jouer pour que les règlements de l'an prochain fonctionnent au mieux. […] Je piloterai ce qu'on me donne. Je suis pilote de F1, je serai toujours heureux de piloter ce qu'il y a de mieux dans ce sport."
Quant à la nostalgie des V10, elle est réelle — mais lointaine.
"Oui, il y a une vraie dimension romantique autour des V10. Je n'étais pas assez vieux pour les entendre en piste, donc je n'ai peut-être pas la même nostalgie. Mais ce serait quand même très sympa à avoir."
C'est peut-être cette même nostalgie qui avait motivé la FIA à explorer, en parallèle, un projet de V10 hybride, avec 70 % de puissance thermique et 30 % électrique. Mais le compromis, jugé trop lourd et trop gourmand, a été enterré sans même passer au vote.
Esteban Ocon, de son côté, remettait la question du son dans une autre perspective. Pour lui, ce n'est pas tant l'hybridation qui est en cause, mais bien l'omniprésence du turbo.
"Ces moteurs sont très puissants et agréables à piloter. […] Mais il manque du son. […] On pourrait très bien rouler avec un moteur atmosphérique — V6, V8, peu importe — même un cinq cylindres, ce serait génial. Même un trois cylindres aurait du son. Le problème, c'est le turbo."
Enfin, Lance Stroll pointait un autre aspect que la FIA devra surveiller : le poids.
"Les V10, ça sonne bien. Mais ce qui compte, c'est d'avoir des voitures légères. Les voitures légères sont plus amusantes à piloter. Or elles sont devenues lourdes, trop grandes avec les années. Il faut garder ça en tête pour la suite."
Le sommet moteur de Bahreïn (qui a eu lieu après la conférence de presse pilotes) a donc tranché : le règlement 2026 n'évoluera pas dans l'immédiat. Le retour du V10, même en hybride, a été balayé par les trois motoristes les plus engagés dans le processus. Seule porte entrouverte : un éventuel assouplissement des règles d'homologation en cas de déséquilibre technique manifeste après 2026.